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30 juin 2017 5 30 /06 /juin /2017 15:58

 

 

Ibn Taïmiya dévoile l’avocat du diable

(Partie 2)

 

 

Quant au Verset : (Tuez-les partout où vous les trouvez),[1] celui-ci revient deux fois dans le Coran, notamment à la suite du Verset [que nous avons évoqué précédemment] : (Combattez sur le sentier d’Allah ceux qui vous combattent, mais sans transgresser les limites • Tuez-les partout où vous les trouvez et sortez-les d’où ils vous ont sorti)[2] (…)

 

Tout homme armé qui s’attaque aux croyants doit être tué là où il se trouve. La sentence qui le concerne ne s’applique pas uniquement au champ de bataille.

 

Toute personne parmi les combattants ennemis qui sème la terreur au milieu des musulmans doit périr par les armes qu’il soit debout, assis, ou couché, et même s’il est prisonnier. L’Ami d’Allah (r) a fait abattre plus d’un prisonnier à l’exemple d‘Uqba ibn Abî Mu’aït, et e-Nadhr ibn el Hârith. Par ailleurs, Sa’d ibn Mu’âdh a prononcé contre les Banû Quraïzha qui se sont rendus à son jugement, d’exécuter les combattants et de capturer les femmes et les enfants. Deux cent hommes furent mis à mort.[3] [Les textes scripturaires judaïques prescrivent le même sort à leurs prisonniers dans le meilleur des cas, sinon tous les vaincus sont passés au fil de l’épée sans ne laisser aucun survivant parmi les femmes et les enfants ;  voir : Deutéronome 20 ; 10-17 ndt.]

 

En fait, l’Imam a le choix sur le sort des prisonniers, entre les exécuter, les mettre en captivité, les libérer, ou les échanger contre une rançon. Son choix va dépendre de l’intérêt supérieur des musulmans.[4] Il est permis de tuer (sans condition contrairement aux dissidents musulmans pour lesquels l’expédition punitive est soumise à certaines restrictions) tout ennemi non musulman, même prisonnier, parce qu’il a tenu les armes, mais aussi pour prévenir contre toute nuisance à venir. Rien ne lui empêche en cas de libération ou de demande de rançon, de causer du tort aux musulmans.[5] Dans le cas des Banû Quraïzha, le Législateur savait qu’à l’avenir les musulmans ne seraient pas en mesure d’empêcher le mal immense qu’ils cogitaient contre l’Islam.[6]

 

Par ailleurs, le meilleur des hommes (r) – mais aussi ses adeptes de la première époque – a réduit à la captivité des hommes et des femmes parmi les païens ; il ne leur a jamais imposé de se convertir sous la contrainte. Il a en effet capturé Thumâma ibn Aththâr qui était polythéiste, il l’a ensuite libéré sans ne l’avoir jamais contraint à l’Islam. Il s’est d’ailleurs converti de lui-même. Certains prisonniers de la bataille de Badr ont pris la même initiative. Quant aux femmes captives, celles-ci furent nombreuses, mais le Prophète (r) n’a jamais forcé l’une d’entre elle à épouser la foi naissante ; il ne l’a fait ni pour aucune femme ni pour aucun homme.

 

Le jour de la Conquête de la Mecque, il a laissé ses habitants libres et n’a pas cherché à gagner leur adhésion par la force. Il les a relâchés alors qu’ils s’étaient rendus, d’où leur surnom les tulaqâ (les libérés), qui sont les convertis de la Grande Conquête. Le terme « libéré » s’inscrit en opposition à « prisonnier » ; à un moment donné, ils furent donc bel et bien privés de liberté ; il les a libérés comme on libère des prisonniers, et sans les contraindre à la religion musulmane. Safwân ibn Umaïya et tant d’autres qui étaient restés attachés au polythéisme ont rejoint les rangs des musulmans à la bataille de Hunaïn. Ils n’ont reçu aucune menace, mais ils se sont convertis par la suite de leur plein gré. Y-a-t-il plus éloquent pour affirmer qu’il n’y eu aucune conversion forcée ! Nul n’est en mesure de prouver qu’un seul homme fut invité à embrasser l’Islam sous la menace, qu’il s’y soit soumis ou non.

 

D’ailleurs, il n’y a aucun intérêt à ce qu’un tel individu rejoigne les rang des musulmans, mais nous acceptons plutôt celui qui en a émis la volonté, quand bien même tout porte à croire qu’il fut mu par la crainte de l’épée, à l’exemple des païens ou des adeptes du Livre qu’il est pourtant permis de tuer sur le champ de bataille. À partir du moment où l’un d’eux extériorise sa conversion, son sang et ses biens deviennent sacrés, conformément aux paroles du Prophète (r) : « J’ai reçu l’ordre de combattre les hommes jusqu’à ce qu’il atteste qu’il n’y a d’autre dieu en dehors d’Allah et que Mohammed est le Messager d’Allah. S’ils s’y soumettent, ils se préservent contre moi leur sang et leurs biens, sauf ce que la Loi en réclame, et Allah est Celui qui les jugera. »[7] Il a en outre reproché à Usâma ibn Zaïd de mettre fin à la vie d’un homme avec lequel il décousait, alors qu’il venait juste de renoncer à la mécréance. Pour sa défense, Usâma maintenait que sa victime s’était soumise à l’Islam sous la pression de l’épée.[8]

 

Or, il incombe de distinguer, de la part du Prophète (r) ou de n’importe qui d’autre, entre forcer l’ennemi à se convertir et lui faire la guerre en vue de parer à son injustice et à son animosité contre la religion. Une fois convertie, la personne compte parmi les membres de l’Islam, il n’est donc plus permis de la combattre. Dans le mesure où le Prophète (r) sentait que quelqu’un ne causait aucun tord à la religion ni à ses adeptes, il évitait de s’en prendre à lui, que ce dernier adhère à la religion du Livre ou non (…) Le sceau des messagers (r) ne s’est jamais attaqué au non musulmans avec lesquels il avait noué un traité de paix. Les ouvrages sur la biographie prophétique, de hadith, d’exégèse, de fiqh, et sur les expéditions prophétiques témoignent de cette réalité communément transmise. Il n’a jamais pris l’initiative des hostilités contre quiconque ; si Allah lui avait imposé de tuer tous les mécréants, il leur aurait alors déclenché la guerre sans sommation.

 

Quant aux chrétiens, il n’a jamais combattu l’un d’entre eux en vue qu’il renie sa croyance par la force. Il envoya ses messagers après l’accord de paix conclu à el Hudaïbiya aux rois de la terre afin de les inviter à l’Islam. Il fit transmettre un courrier à Chosroes (empereur Sassanide ndt.), César (l’empereur romain qui fut Héraclius à cette époque ndt.), el Muqawqas (le gouverneur d’Égypte ndt.), le Négus (le roi d’Abyssinie ndt.), et les rois arabes des régions du Nord et du Shâm. Il s’en est suivi qu’une partie des chrétiens notamment ont embrassé l’Islam.

 

Les armées chrétiennes ont alors fait route vers le Shâm où ils ont éliminé à  Ma’ân plusieurs de leurs élites qui avaient changé de confession. Ce sont les chrétiens qui ont ouvert les hostilités contre les musulmans à travers une campagne inique d’élimination de tous ceux qui avait adjuré leur foi. Le mari d’Aïsha (r) n’a fait qu’envoyer des courriers dans lesquels il invitait les peuples à embrasser la nouvelle religion de leur plein gré non par la force. Il n’a forcé personne à le faire. En réaction à l’hostilité des chrétiens, il fit sortir ses troupes à la tête de Zaïd ibn Hâritha ; le martyre lui fit céder l’étendard successivement à Ja’far et à ibn Rawâha que la mort emporta également. La première bataille qui eut lieu entre les musulmans et les chrétiens se déroula à Mu-ta dans les terres du Shâm où une grande armée chrétienne s’était rassemblée pour en découdre avec la nouvelle menace qui planait sur leur empire en déclin.[9]

 

 Quant à la jiziya, elle permet au non musulman de préserver son sang. Le glaive ne sert nullement à éliminer les mécréants comme il ne peut les préserver contre les châtiments de l’Au-delà. Il sert plutôt à parer à leur mal et à leur tentative de détourner les hommes de la vraie religion. La seule façon de remédier à ce mal, c’est de les soumettre au tribut. En les soumettant à un pacte de dépendance, ils ne s’attaqueront plus à l’Islam ni par la parole ni par les actes. Par ailleurs, les dhimmîs ne participent pas à la guerre, ce sont plutôt les musulmans qui défendent leurs biens et leur vie contre un ennemi éventuel. Le tribut est une sorte de butin qui permet d’entretenir les armées musulmanes ; en cela, c’est une marque de bienfaisance envers le vaincu.[10]

 

Ainsi, le sang est préservé soit par l’adhésion à l’Islam soit par le tribut et l’état de soumission. Soit l’individu se soumet à l’adoration du Seigneur soit il devient utile aux musulmans. Le croyant remplit son devoir en adorant Allah et le non musulman est utile au croyant en lui versant ce qui permet de compenser (du moins sur terre) sa non-soumission au Tout-Puissant. Il fut épargné ainsi dans l’espoir qu’Allah le guide sur le droit chemin, et qu’Il lui inspire le repentir. Les « gens du Livre » plus particulièrement détiennent la preuve dans leurs écriture de la prophétie de Mohammed (r) ; cet intérêt en lui-même justifie de les laisser en vie. Vouloir les punir à cause de leur mécréance, ne remédie en rien à leur situation quoi que haïssable.[11]

 

Pour réfuter l’idée que ce principe n’a jamais été abrogé, ibn Taïmiya utilise une anecdote révélatrice

 

Il s’agit de l’histoire qui relate l’assassinat d’Abû Râfi’ ‘Abd Allah ibn el Huqaïyiq, le juif qui portait atteinte au Messager (r) ; il le dénigrait sans arrêt et appelait à son meurtre. Dans son recueil e-sahîh, el Bukhârî immortalise l’évènement.[12]

 

Une autre version du hadîth donne de plus amples précisions sur les circonstances de la mise à mort. Selon ‘Abd Allah ibn Ka’b ibn Mâlik, les protagonistes grimpèrent dans l’une des chambres où il se trouvait. Sa femme, qui les avait sentis, signala leur présence en poussant un cri. Ils avaient reçu pour consigne par le sceau des Prophètes (r) de ne tuer ni femme ni enfant. Un homme du groupe voulut la frapper de son glaive, mais retint son bras quand il se rappela les consignes. Ils se jetèrent comme un seul homme sur la cible qu’ils transpercèrent de leurs lames. ‘Abd Allah ibn Unaïs lui donna le coup de grâce en lui enfonçant de tout son poids son épée en plein ventre.[13]

 

Sheïkh el Islâm commente : « Je me suis appuyé sur cette histoire pour dissiper l’allégation erronée selon laquelle l’interdiction du meurtre de femmes viendrait abroger la loi qui aurait été en vigueur avant la conquête de La Mecque. Il va sans dire qu’aux yeux des savants, une telle pratique n’a jamais été autorisée. Si on regarde la chronologie et la teneur des textes de la guerre, nous nous rendrons compte de la véracité de ce propos.

Aucun assaillant n’eut en tête de prendre pour esclave les membres du sexe opposé qui se trouvaient cette nuit-là derrière l’enceinte d’ibn el Huqaïyiq. Elles jouissaient encore de tous leurs droits sous la protection des habitants de Khaïbar bien avant la prise des Lieux saints. Sans compter qu’au cours de l’opération, l’une des occupantes poussa un cri qui risquait de tout faire échouer. Pourtant, personne ne lui posa la main dessus, car trop tétanisée par la peur, elle était hors d’état de nuire. »[14]

 

À suivre…

                     

Par : Karim Zentici

http://mizab.over-blog.com/

 

 

 

[1] La vache ; 191 et Les femmes ; 91

[2] La vache ; 190-191

[3] Qâ’ida mukhtasara fi qitâl el kuffâr (p. 102-103). Certaines sources estiment que le nombre des exécutions varie entre six cents et sept cents [voir : Zâd el Ma’âd d’ibn el Qaïyam (3/135)]. Quoi qu’il puisse être choquant, il faut replacer cet événement dans son contexte historique. Nous sommes au septième siècle de l’ère chrétienne, il faut s’imaginer ce que les puissances de l’époque étaient capables de faire à leurs prisonniers. Mohammed (r) n’étaient pas soumis aux Conventions de Genève que les fondateurs eux-mêmes ne respectent pas à l’aube du troisième millénaire. Accusés de haute trahison, il ne faut pas voir dans ce jugement prononcé contre la tribu des Banû Quraïdha une épuration ethnique comme l’allèguent certaines personnes mal intentionnées ou tout simplement mal informées. Pour preuve, les femmes, les enfants, et toute personne n’ayant pas participée au combat en général furent épargnés. En outre, les deux autres tribus juives de Médine, les Banû e-Nadhîr et les Banû Qaïnuqar qui étaient liés avec les autres habitants de la ville par un pacte d’entraide furent accusés également de trahison, mais ils n’ont pas connu le même sort que leurs coreligionnaires. D’ailleurs il existe un amalgame entre la religion juive et la race juive ; quoiqu’il en soit l’Islam interdit formellement de s’en prendre gratuitement à toute personne appartenant à cette ethnie religieuse. Contrairement au judaïsme, l’Islam ne fait aucune discrimination raciale comme le souligne ibn Taïmiya en disant : « Si tu t’imprègnes de ce qu’était réellement la Tradition prophétique, tu te rendras compte que le Messager (r) n’a jamais fait de distinction entre un arabe et un non arabe (…) Il n’a jamais privilégié les arabes dans la religion, ni en ce qui concerne le tribut, ni en ce qui concerne la captivité. Il ne les jamais favorisé dans les traités de paix, il n’a jamais décrété qu’un non arabe n’était pas du même rang qu’un arabe au niveau du mariage, et il ne leur a jamais permis de jouir d’une chose indépendamment des autres. Il fondait cependant ses jugements sur les hommes en fonction des noms que le Coran leur donne comme : croyant/mécréant, vertueux /pervers. » [Qâ’ida mukhtasara fi qitâl el kuffâr (p. 179, 183).]      

[4] E-sârim el maslûl (2/469).

[5] Qâ’ida mukhtasara fi qitâl el kuffâr (p. 195-196).

[6] Idem. (p. 200).

[7] Rapporté par el Bukhârî (n° 25, 392) et Muslim (n° 20, 21). Ce hadith donne la raison pour laquelle le Prophète (r) fait la guerre aux hommes, cela ne signifie pas qu’il doit combattre chaque être humain pour obtenir sa conversion. Voir : Qâ’ida mukhtasara (95-96). 

[8] Rapporté par el Bukhârî (n° 4021) et Muslim (n° 96).

[9] Qâ’ida mukhtasara fi qitâl el kuffâr (p. 129-138).

[10] Idem (p. 214-215).

[11] Idem (p. 218-219).

[12] Rapporté par el Bukhârî (n° 4039).

[13] Rapporté par el Wâqidî dans el maghâzî (1/292-294), ibn Hishâm dans e-sîra (2/275), el Baïhaqî dans dalâil e-nubuwwa (4/34), avec une chaine narrative jugée « bonne ».

[14] E-sârim el maslûl (2/258).

 

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