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19 juin 2020 5 19 /06 /juin /2020 15:48

La foi est-elle synonyme de calvaire sur terre ? 6/6

 

 

Extraits du traité de l’amour révérenciel d’ibn Taïmiya.  

 

Le Prophète illettré apporte une religion parfaite : (À ceux qui suivent le Messager, le Prophète illettré, dont ils connaissent la description à travers leurs écrits, la Thora et l’Évangile. Celui-là même qui leur ordonne le bien et qui leur interdit le mal ; lui qui leur déclare licite tout ce qui est pur et illicite tout ce qui est impure ; lui qui les délivre des fardeaux et des lourds carcans qui pesaient sur eux. Qui croit en lui, le soutient, et le défend, et qui a pour guide la lumière qui accompagne sa mission, gagnera le succès).[1] Cette religion vise à débarrasser le fidèle des carcans liés à l’exercice du culte : (Vous croyants, avant d’observer la prière, procédez à vos ablutions ; lavez-vous le visage et les mains jusqu’aux coudes, puis, passez-vous les mains mouillées sur la tête et enchainez sur les pieds en les lavant jusqu’aux talons ; mais, quand vous êtes en état d’impureté, procédez à un bain, sauf dans la situation où la maladie vous fait obstacle ou qu’en voyage, après avoir satisfait vos besoins naturels ou avoir eu commerce avec vos femmes, vous ne trouviez pas d’eau, alors ayez recours aux ablutions sèches en vous passant de la terre pure sur le visage et les mains ;  Allah n’entend vous causer aucune gêne, mais Il veut juste vous purifier et vous combler entièrement de Ses bienfaits, ainsi serez-vous reconnaissants).[2]

 

Allah prévient que la Législation du culte n’est censée causée « aucune gêne ». L’expression qui renforce cette idée n’est pas anodine. Celle-ci est composée d’un nom commun indéfini appuyé par une particule de négation pour exprimer la généralité. Autrement dit, n’importe quelle gêne (à condition qu’elle soit effective, ndt.) est englobée par cet ensemble. Le véritable but de ces dispositions est de purifier les âmes, ainsi que de les combler entièrement des bienfaits prodigués par le Compatissant. Un autre Verset entérine ce principe : (Lui qui vous a élu sans ne vous accablez de la moindre gêne dans l’exercice du culte hérité de votre père Abraham, lequel vous a donné dans les Écritures antérieures le nom de musulmans que vous gardez encore dans ce Livre, afin que le Prophète soit témoin que le message vous ait été transmis, et que vous-mêmes soyez témoins que les hommes l’aient bien reçu).[3]

 

La contrainte, l'embarras, la gêne et la difficulté sont étrangers au vocabulaire de la religion. Cet effet rhétorique est dû à la particule de négation indiquant un sens général. Imaginer le contraire revient à faire mentir le Législateur. Quoi que cette odieuse implication ne soit rien comparée à celle infirmant la présence de la Sagesse infinie du Tout-Puissant derrière l’établissement de la Loi amputée de sa prétention à optimiser le bien-être sur terre.

 

Or, cette affirmation catégorique sur l'absence de contrainte ne va nullement en opposition avec le phénomène constaté chez les âmes faibles portant un regard mitigé sur certaines Lois. Plus la foi est faible plus le poids des responsabilités religieuse pèse sur les épaules. Ce malaise confine parfois à l’hypocrisie, ou en tout cas, il en trahit les symptômes : (Non, jure Ton Seigneur par Lui-même ! Ils ne prétendront jamais à la foi sans te soumettre leurs litiges, avec pour volonté d’accueillir ton jugement à cœur ouvert, en s’y pliant sans réserve ni le moindre ressentiment)[4].

Les modalités du jeûne offre un exemple parfait de cette volonté de souplesse en faveur du fidèle : (Le mois du ramadhân fut marqué par la Révélation du Coran qui, armé de preuves éclatantes, guide les hommes sur une voie lumineuse en guise de discernement qui tranche et sépare le bien du mal ; qui d’entre vous assiste au début du mois doit entamer le jeûne, sauf s’il est malade, voire en voyage ; dans ce cas, il devra récupérer plus tard les jours manqués ; Allah désire seulement vous faciliter la tâche, et veille à vous soulager de la difficulté, alors veuillez achever le mois au terme duquel vous proclamerez la grandeur de Celui qui vous a guidé, ainsi serez-vous reconnaissants).[5]

 

Il est clair qu'Allah ne désire pas nous accabler de difficultés, et à fortiori, Il n’a pas la volonté de nous éreinter sous le poids des contraintes aussi nocives qu’impossible à supporter.

 

De plus, Dieu nous inculque par le biais de Son Livre que la foi est préférable à la rébellion, et cette préférence est valable aussi bien ici-bas que dans l’autre monde. Il est vrai que les pervers se figurent, du haut de leur ignorance, qu’ils profitent mieux de la vie que les dévots ascètes. Leur hypocrisie les aveugle si bien qu’ils ont une très mauvaise opinion des Commandements divins assimilés à des entraves plus contraignantes que bénéfiques.

Le Coran se charge de démentir ces misérables : (La guerre, que vous répugnez, vous a été prescrite. Or, vous pouvez détester une chose qui, en réalité, vous rapporte un intérêt, comme vous pouvez aimer une chose qui, en réalité, vous cause du tort, et Allah sait ce que vous ne savez point)[6] ; (Au lieu de cela, ils adoptèrent les pratiques des démons en usage sous l’ère de Sulaïmân qui ne fut coupable d’aucun blasphème à la différence des démons ayant transmis aux hommes l’art de la sorcellerie. Les hébreux furent tout autant enclins aux enseignements que Harout et Marout exerçaient en terre de Babel. Les deux anges prenaient soin de prévenir tout initié avant de l’instruire : prend garde de perdre la foi, car notre art n’a d’autre vocation que de tenter les hommes ! Ces initiés acquirent le pouvoir de séparer un homme de sa femme ; ce pouvoir maléfique, qui n’avait d’effet que par la Volonté de Dieu, causait leur ruine, malgré les maigres avantages qu’ils en tiraient. Ils savaient pertinemment qu’ils avaient troqué le bonheur éternel. Ils se rendaient ainsi coupable d’un piètre négoce s’ils en avaient vraiment conscience !).[7]

 

Le Livre saint met à nu le fond de leur pensée vis-à-vis de ce charlatanisme qui non seulement ne rapporte rien après la mort, mais pour lequel il va falloir rendre des comptes. Ces esprits superficiels sont mus par la seule ambition de profiter de la vie, sans se soucier du lendemain. On les baptise volontiers « d’esprits vivants » maitrisant l’art de mener une belle vie, pensent-ils. Les lendemains ne sont malheureusement pas aussi reluisants : (Ils auraient tiré un meilleur avantage de la part de leur Seigneur à se résigner à la foi et à la piété, mais en avaient-ils seulement conscience ?).[8]

La foi qui anime le cœur des élus de Dieu embellit leur quotidien et garantit un bien-être qu’on ne retrouve pas chez ces misérables qui courent après les honneurs avec une insatiable et aveuglante cupidité. Les pieux sont doublement récompensés puisqu’en fin de parcours, ils gagnent le Paradis éternel où ils ne connaitront plus jamais la moindre affliction. En voici un exemple avec le Prophète Joseph : (C’est ainsi que Nous avons installé Youcef dans les hautes sphères du pays qui lui ont conféré une large liberté d’action ; c’est ainsi que Nous étendons Notre Miséricorde sur qui bon Nous semble parmi les bienfaiteurs qui ne perdent jamais leur salaire auprès de Nous).[9] Voici pour la récompense terrestre, l’autre est annoncée tout de suite après : (Seulement la récompense prévue dans l'au-delà est bien plus fructueuse en l’honneur des croyants ayant vécu dans la crainte de leur Seigneur).[10]

 

Ce thème est récurrent dans les pages du saint Coran : (Combien de prophètes prirent-ils, aux côtés de leurs disciples en nombre, les armes pour défendre la cause d’Allah sans ne jamais se laisser abattre par les revers ni capituler ni même faillir, et Dieu aime cette endurance et cette persévérance • Ces patients n’avaient rien d’autres à la bouche que ces mots : Seigneur, pardonne nos péchés, et nos manquements à nos devoirs, alors raffermis nos pas et donne-nous la victoire sur le peuple infidèle • Dieu récompensa leur détermination ici-bas et Il leur réserve une part meilleure dans l'au-delà, car Il aime les bienfaiteurs)[11] ; (Ibrahim était un modèle de dévouement et de fidélité envers Dieu, car jamais il ne s’était compromis avec les idolâtres • Toujours prompt à la gratitude envers Celui qui le combla de Sa Grâce en l’ayant choisi au milieu des élus et guidé sur le chemin droit • Nous l’avons honoré ici-bas, et dans l'au-delà, il sera comblé davantage au milieu des vertueux).[12]

 

De toute façon, le choix de la soumission aussi contraignant soit-il est toujours plus avantageux que d’y renoncer, même à court terme : (Si l’ordre leur avait été donné de s’entretuer ou de prendre le chemin de l’exil, ils ne s’y seraient jamais pliés à part une infime minorité d’entre eux ; ils feraient bien mieux de prendre Nos exhortations au sérieux, car il en va de leur intérêt et de la vitalité de leur foi • Et ils auraient droit, en prime, à une récompense incommensurable de Notre part En plus d’être guidés sur le droit chemin).[13] Voici dans quel contexte furent proférées ces remontrances : (As-tu songé à ces hommes qui, en apparence, donnent foi à la Révélation qui te fut consacrée et aux Écritures anciennes, alors qu’ils recourent à l’arbitrage d’une loi maléfique à laquelle ils sont censés renoncer ; c’est bien là l’œuvre de Satan qui cherche à les enfoncer davantage dans les ténèbres de l’égarement).[14]

 

[La quête du bonheur]

 

Secundo : il y a deux façons d'accéder au bien-être ; soit par le biais d'éléments matériels soit par le biais d'éléments spirituels. Les éléments matériels se répartissent en biens physiques (nourriture, boisson, vie conjugale, vêtements, etc.), et en biens psychologiques qui se concrétisent par la domination et le pouvoir. 

Pour ce qui est du bien-être matériel : le croyant, l'hypocrite et le mécréant participent indistinctement à sa réalisation. De plus, le bien-être est loin d’être une notion virtuelle qui satisferait à l’identique tous les besoins de tous les hommes. En réalité, le bien-être varie énormément d’un individu à une autre en fonction des particularités de chacun et du milieu. Certaines cultures sont habituées à telle variété de nourritures et de boissons qui, sous d’autres climats, serait nocive à la santé. Les particularités physiologiques, psychologiques, culturelles, climatiques, etc. jouent un rôle important dans le choix des éléments appropriés assurant le « bien-être » individuel et collectif.

 

Le critère pour définir une « femme belle » ne sera pas le même partout ; dans les pays exotiques, on est plus attiré par les brunes, alors que dans les pays nordiques, on a un penchant prononcé pour les blondes. Les « modes » et le style d’habitat varie tout autant d’un endroit à l’autre ; le burd (qui est un manteau à rayure, ndt.), est prisé dans certaines régions du monde au moment où ailleurs, il n’a aucun succès. Le choix de l’architecture est également très subjectif.

 

Par ailleurs, la rotation des saisons influence les goûts. Par exemple, en hiver on a plutôt tendance à privilégier le chaud, et en été on recherche plutôt la fraîcheur. La notion de bien-être est donc subjective. Celui-ci s’adapte avant tout aux besoins qui se manifestent avec des intensités différentes en fonction de leur importance. Plus un élément est utile plus le besoin de se l’accaparer se fait ressentir et plus grande est la satisfaction lorsqu’il est comblé. Le Législateur autorise l’utilisation et la consommation des éléments sains. Cependant, une nourriture consommée avec modération est plus appréciable que celle dévorée avec excès. La boulimie est une drogue qui entame le plaisir de manger. On ne mange plus pour apaiser la faim, mais par addiction. Quand on perd le contrôle de soi on met sa santé en danger, si l’on sait que l’excès de nourriture provoque diverses maladies.

 

Pour ce qui est du bien-être spirituel : celui-ci réunit deux éléments indissociables et indispensables à l’émancipation spirituelle de l’individu : la foi et l’obéissance. La foi se nourrit d’informations dont l’utilité est proportionnelle à leur importance et à leur véracité. Le monothéiste est privilégié dans la mesure où il n’a pas à s’inquiéter sur l’authenticité des enseignements prodigués par la Révélation. Il est donc tranquille de ce côté-là, alors que les informations d’origine humaine n’offrent pas cette garantie.

 

L’efficacité de l’obéissance est tributaire de la pertinence des injonctions qui sont censées à la fois être justes et utiles, sinon l’obéissance n’aurait aucune saveur et perdrait tout son intérêt. Nous avons là les deux ingrédients du savoir à même de discerner le vrai du faux, à savoir qu’un savoir pertinent est à la fois profitable et empreint de justice. Le Coran tout entier tourne autour de ce pivot : (Dieu réduit à néant les œuvres des mécréants qui se détournent de la vérité et qui détournent les hommes À l’inverse des croyants qui accomplissent les bonnes œuvres et qui tiennent pour vrais les enseignements révélés à Mohammed et empreints de la vérité émanant du Seigneur ; Il va donc absoudre leurs fautes et améliorer leur sort • Cela parce que les mécréants se sont complu dans l’erreur, alors que les croyants sont restés fidèles à la vérité émanant du Seigneur. Dieu dresse ici les paraboles du bien et du mal)[15] ; (L’Illusion dans laquelle baignent les œuvres des mécréants est semblable à un mirage qui prend la forme d’une étendue d’eau aux yeux d’un homme assoiffé au milieu du désert, et qui, arrivé sur place, s’aperçoit qu’il n’y a rien. Et, dépité, il se retrouve confronté à Dieu qui lui dresse le bilan de ses comptes avec une promptitude imparable dans Ses calculs).[16]

 

Pour comprendre ce phénomène, il incombe de s’arrêter sur les deux versants qui se disputent la vérité : la vérité voulue et la vérité connue. Il existe entre elles un lien indélébile d’interaction et d’interdépendance. La vérité connue est, quant à elle, effective et indubitable. Le savoir qu’elle réfléchit est vrai, tout comme l’information qui la désigne. La vérité voulue, pour sa part, renvoie au savoir profitable à l’être qui en fait la quête et qui bénéficie de ses fruits.

 

                     

Par : Karim Zentici

http://mizab.over-blog.com/

 

 

 

 

 

 

 

 

[1] Les remparts ; 157

[2] Le repas céleste ; 6

[3] Le pèlerinage ; 78

[4] Les femmes ; 65

[5] La vache ; 185

[6] La vache ; 216

[7] La vache ; 102

[8] La vache ; 103

[9] Yûsaf ; 56

[10] Yûsaf ; 57

[11] La famille d'Imrân ; 146-148

[12] Les abeilles ; 120-122

[13] Les femmes ; 66-68

[14] Les femmes ; 60

[15] Mohammed ; 1-3

[16] La lumière ; 39

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commentaires

S
Merci d'avoir visité notre site<br /> http://virtuelcampus.univ-msila.dz/facdroitsp
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S
tres bon sujet
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