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21 mai 2017 7 21 /05 /mai /2017 11:07

 

Tout sur le djihad

(Partie 2)

 

Les vertus du djihad

 

Le djihad est un sujet qui remue les passions aujourd’hui, et ce n’est pas étonnant au vu des agressions et des persécutions qui s’abattent quotidiennement sur les musulmans. La « guerre sainte » est noble en soi et rapporte une récompense énorme quand l’objectif est sain, et motivé par la seule volonté de plaire au Visage d’Allah prévient le Coran : [Allah a acheté les âmes des croyants et leurs richesses en échange du Paradis, s’ils tuent et se font tuer sur Son sentier ; Il en a fait la promesse en toute vérité dans la Thora, l’Évangile et le Coran ; personne n’est aussi prompt à tenir sa promesse, alors réjouissez-vous de ce troc que vous avez contracté, car vous avez là un succès immense].[1]

 

Ibn Nahhâs propose une analyse extraordinaire de ce Verset. Qu’on en juge : « On reconnait la valeur d’une marchandise à trois choses :

  • À la valeur de l’acheteur, car, en temps normal, il est improbable que quelqu’un de haut rang se rabaisse à acheter par lui-même de viles marchandises, et il ne convient pas de dire qu’il en est l’acquéreur.
  • À la valeur de celui qui recommande la marchandise, car un courtier digne de ce nom ne fait jamais l’intermédiaire pour des choses qui n’en valent pas la peine.
  • Au prix à payer, car on ne brave pas tous les dangers pour des choses insignifiantes.

Comparons alors avec les âmes des guerriers et des martyrs dont le noble acheteur n’est autre que le Très-Haut avec qui il fait la transaction de la plus précieuse de Ses créations, le Paradis ; ce Paradis dont l’acquisition offre le meilleur des voisinages, celui du Seigneur de l’univers. Sans compter que les bénéficiaires de cette transaction ne partagent ce gracieux privilège avec personne. »[2]

 

Ibn el Qaïyim fait pratiquement le même constat dans un passage qu’il conclut par ces mots : « Le Paradis est la marchandise du Seigneur de la terre et des cieux et dont Il fait la transaction ; son prix est la vision béatifiante de Son Visage majestueux là où on pourra écouter Ses Paroles ; le courtier qui prend en main le négoce n’est autre que Son Messager. Comment peut-on dès lors négliger et laisser passer une marchandise aussi alléchante ? Ou, comment peut-on l’échanger contre un prix vil là où la vie éphémère est vouée à l’extinction ? Quelle perte et quel gâchis ! On se rendra compte des dégâts de cette grossière supercherie, le jour des règlements de comptes, quand la balance des pieux sera lourde et que celle des incrédules sera légère. »[3]

 

D’après el Bukhârî et Muslim, selon Abû Huraïra, le Messager d’Allah (r) a dit : « Allah garantit à Son serviteur qui part en campagne sur Son sentier : « S’il est parti en guerre sur Mon sentier alors qu’il a foi en Moi et à Mes messagers, Je me porte garant de le faire entrer au Paradis ou de le ramener chez lui d’où il est parti, en lui offrant soit la récompense soit le butin. » Par Celui qui détient l’âme de Mohammed entre Ses Mains ! S’il est touché sur le sentier d’Allah, il ressuscitera le jour du jugement dernier en baignant dans sa blessure, comme à ses premiers instants. Elle aura la couleur du sang, mais l’odeur du musc.

Par Celui qui détient l’âme de Mohammed entre Ses Mains ! Si ce n’était la crainte de faire peser un fardeau aux musulmans, je ne manquerais jamais à l’appel d’une expédition sur le sentier d’Allah. Néanmoins, je n’ai pas les moyens de les emmener. Eux-mêmes n’ont pas les moyens de venir, et il leur serait très pénible de me voir partir en les laissant derrière moi.

Par Celui qui détient l’âme de Mohammed entre Ses Mains ! J’aimerais me faire tuer sur le sentier d’Allah, et ressusciter ensuite pour me faire tuer à nouveau sur Son sentier, et ressusciter pour me faire tuer encore. »[4]

 

Quoi qu’il en soit, les vertus du djihâd sont innombrables, et les textes qui en parlent sont facilement retrouvables et connus de tous. Ils abordent un noble domaine de la religion, et c’est ce qui explique pourquoi par le passé, il était l’apanage des gens nobles et pieux.

 

Ibn el Qaïyim nous offre des perles dont il a le secret : « Leçon précieuse : Allah (I) révèle : [Ceux qui redoublent d’efforts pour Notre cause, Nous allons les guider sur Nos sentiers][5] ; Le très-Haut fait un parallèle entre partir en guerre et suivre la bonne voie ; les hommes les mieux guidés sont ceux qui s’investissent le plus dans le djihâd, en sachant que le djihâd prioritaire commence par un effort sur soi dans un combat incessant contre les passions, Satan, et les épreuves de la vie. En affrontant ces quatre ennemis pour la cause d’Allah, on sera guidé en retour vers les sentiers de Son Agrément qui mènent droit au Paradis. À l’inverse, moins on fait d’effort dans ce sens, et moins on est guidé sur le droit chemin. El Junaïd le dit lui-même :

« Ceux qui luttent pour Notre cause contre leur penchant à travers le repentir, Nous allons les guider sur les sentiers de la sincérité exclusive à Dieu. »

Ainsi, on ne peut venir à bout de l’ennemi apparent sans triompher de ses ennemis cachés ; quand on a le dessus sur les seconds, on a le dessus sur les premiers, et le contraire est aussi vrai, soit que si c’est les seconds qui prennent le dessus, alors il faut s’attendre au péril entre les mains des premiers. »[6]

 

Le djihâd est un devoir moral qui incombe à tous

 

Il incombe à chaque musulman de penser au djihâd, peu importe qu’Allah lui en donne l’opportunité ou non dans un avenir plus ou moins proche, car le triomphe collectif est  tributaire de ce sentiment individuel. Ainsi, la notion d’effort est constamment présente ; si le groupe n’est pas capable de faire le djihâd par les armes, il peut se replier sur le djihâd par la langue en se concentrant sur la prédication, ou, sinon, il lui reste le djihâd intérieur, celui qui le cœur pour arme.

 

« Le djihâd, souligne ibn Taïmiya, bien qu’il relève de l’obligation collective, s’adresse initialement à tous les croyants. Ils sont tenus de croire à son caractère obligatoire, et d’avoir la ferme intention de répondre à son appel, le cas échéant. C’est pourquoi, le Prophète (r) prescrit : « Quand on vient à mourir sans n’être jamais parti au combat, ou sans jamais n’y avoir pensé, on meurt entaché d’hypocrisie. » Rapporté par Muslim. Il nous informe qu’on est entaché d’hypocrisie quand il laisse indifférent. Par ailleurs, le djihâd est un nom générique qui regroupe plusieurs types d’efforts ; il est donc imposé au musulman de répondre à au moins l’un d’entre eux. »[7]

 

Ailleurs, il renchérit : « Allah (I) éprouve les croyants en leur demandant de sacrifier leur vie au combat pour Sa cause et par amour envers Son Messager. Deux destins s’imposent à eux : le martyre s’ils viennent à mourir ou la victoire s’ils reviennent vivants, exactement comme le souligne le Verset : [Dis-leur : prévoyez-vous pour nous autre chose que l’un des deux heureux évènements].[8] »[9]

 

Le Coran, qui est la source d’inspiration du djihad par la plume, nous dit bien : [Alors ne cède pas à la volonté des infidèles, et sers-toi de ce Livre pour leur livrer un grand combat].[10] Pour ibn el Qaïyim, il s’agit du plus grand des combats.[11] Autrement dit, la plume à l’ascendant sur l’épée. Un  passage des fatâwa d’ibn Taïmiya développe davantage le principe de la prépondérance de la plume sur le sabre : « Allah, nous dit-il, révèle dans Son Livre : [Nous avons envoyé nos prophètes porteurs d’une preuve évidente, et Nous les avons assistés du Livre et de la Balance de toute chose afin que les hommes fassent régner la justice. Nous leur avons également apporté du ciel le fer qui confère une force redoutable en plus de ses multiples usages ; afin qu’Allah, haut de Sa Force et de Sa Puissance, reconnaisse ceux qui défendent sa cause, celle de Ses messagers, en vertu de la foi qui les anime].[12] Il nous informe qu’il a fait descendre sur terre le Livre et la Balance de toute chose afin que les hommes fassent régner la justice. Il nous apprend ensuite qu’Il a également mis à leur disposition le fer, l’autre pilier du pouvoir à même de maintenir la religion. Nous avons donc le livre incitatif et l’épée dissuasive : [mais tu trouveras en Ton Seigneur le guide et le soutien suffisants].[13] Le Livre se situe à la base de la religion. Ainsi, dès l’avènement de l’Islam, le Très-Haut révéla le Livre à Son Messager qui, pendant toute la période mekkoise, ne reçut aucune prescription guerrière. Il fallut qu’il émigre et qu’il s’entoure d’une force pour que la législation du djihad voie le jour. »[14] Le Livre est donc à la base de la religion, tandis que l’épée ne fait que le seconder dans sa mission. C’est à la lumière de cette explication qu’il convient de comprendre l’adage : Le sultan est plus dissuasif, par la Volonté de Dieu, que le Coran, de par la peur qu’il inspire. »[15]

 

Les formes de djihad

 

Sheïkh Sâlih el Fawzân : Ihdhar e-sharîk el khawwân.

 

Le Seigneur de l’univers (I) a ordonné le djihâd à tous Ses serviteurs en fonction des moyens et des possibilités de chacun à travers le Verset : [Consacrez le djihâd pour Allah comme il se doit].[16] Cette injonction est adressée à tous les musulmans. Ce devoir incombe à toute personne qui en a la capacité. Le Très-Haut ordonne à Ses créatures de se soumettre au djihâd comme il se doit, de la même façon qu’Il leur a demandé de Le craindre comme il se doit.

 

Il existe quatre sortes de djihâd :

  1. Le djihâd sur soi.
  2. Le djihâd contre Satan.
  3. Le djihâd contre les infidèles
  4. Le djihâd contre les hypocrites.

 

À l’origine, il consiste à se dompter soi-même. On ne peut combattre l’ennemi extérieur tant que dans un premier temps, on n’a pas pris le dessus sur soi en se soumettant aux obligations et en s’éloignant des interdictions. D’où les paroles du Prophète (e) : « Le mujâhid est celui qui soumet son âme à l’obéissance d’Allah, et le muhâjir (l’émigré ndt.) est celui qui s’éloigne des choses qu’Allah a interdites. »

Ce dernier (e) déclarait notamment au cours de sa formule introductive à ses sermons (khutba el hâja) : « Et nous cherchons refuge auprès d’Allah contre nous-mêmes et nos mauvaises actions. » Un jour, il interpella El Husaïn ibn ‘Ubaïd en ces termes : « Embrasse l’islam et je t’apprendrai des paroles qui te seront utiles. » Il embrassa l’Islam et le Prophète (e) lui prescrivit alors : « Dis : Ô Allah ! Inspire-moi la raison et protège-moi contre moi-même. » Celui qui n’est pas épargné par son propre mal ne peut parvenir au Très-Haut étant donné qu’il constitue lui-même un obstacle qui s’interpose entre lui et cette noble ambition.

 

Il existe deux catégories d’individus : des individus qui parviennent à dominer et à vaincre leur âme en la rendant docile, et des individus qui se laissent dominer par les passions en leur devenant dociles. Allah évoque ces deux catégories dans le Verset : [Quant à celui qui se rebelle • et qui privilégie la vie d’ici-bas • l’Enfer sera son refuge • Quant à celui qui craint de comparaître devant Son Seigneur et qui retient son âme de sombrer dans les passions • le Paradis sera son refuge].[17] Ainsi, l’âme incite l’individu à la rébellion et à privilégier la vie d’ici-bas. Tandis que le Seigneur ordonne à Son serviteur de Le craindre et de contenir son âme. Soit l’individu se laisse guider par ses mauvais penchants qui vont lui causer sa perte, soit il sauve sa personne en répondant à l’appel de Son Seigneur. L’âme incite entre autre à la cupidité surtout quand il s’agit de la bonne cause, mais Allah invite à dépenser sur Son sentier comme le révèle le Verset : [Dépensez cela vaut mieux pour vous • Quiconque se préserve de la cupidité de son âme fera partie des vainqueurs].[18]

 

Ainsi, l’âme gaspille à cœur joie des sommes énormes en vue d’acquérir les futilités de se monde, mais elle fait preuve de beaucoup moins d’empressement envers les pauvres. Parfois, elle incite à faire le mal, parfois elle se culpabilise après avoir sombré dans le péché, et parfois elle s’apaise lorsqu’elle se tourne vers l’adoration, l’évocation et l’amour d’Allah. Avoir l’âme apaisée est louable, être attiré vers le mal est blâmable et se culpabiliser est un sentiment qui vacille entre les deux.

 

Faire un djihâd sur soi consiste à se contenir et à ne pas succomber aux pulsions de l’âme. Un hadith affirme à ce sujet : « L’homme intelligent est celui qui fait ses propres comptes (ou qui soumet son âme), et qui œuvre pour l’autre vie. Quant à l’incapable, il suit ses passions et il fonde sur Allah de faux espoirs. » Faire ses propres comptes revient à faire son autocritique…

 

‘Omar ibn el Khattâb (t) est l’auteur des paroles : « Faites vos comptes avant qu’on vous les fasse et pesez-vous avant que soyez pesés. Il vaut mieux pour le Jugement de demain – le jour où vous serez pesés pour la grande comparution – que vous fassiez vos comptes dès aujourd’hui. [Ce jour-là, vous comparaîtrez et rien de votre vie ne sera caché].[19] Maïmûn ibn Mihrân a dit : « L’individu ne prétendra jamais à la piété s’il n’est pas plus scrupuleux à faire ses propres comptes qu’un marchant envers son associé. »

 

C’est pourquoi, selon le dicton, l’âme est comparable à un associé infidèle. Si tu n’examines pas ses comptes, il se sauve avec ton argent. ‘Omar ibn el Khattâb (t) fit le courrier à l’un de ses exécutants : « Fais tes comptes pendant que tout va bien, et avant qu’on te les fasse quand tout ira mal. C’est ainsi qu’au bout du compte, tu gagneras la satisfaction et fera des envieux. Quant à celui qui se laisse distraire par la vie et absorber par ses passions, il n’aura au bout du compte que déception et regret. »

 

El Hasan affirme quant à lui : « Les comptes seront plus faciles le Jour de la Résurrection pour ceux qui faisaient les leurs sur terre. Les comptes y seront plus pénibles pour ceux qui s’investissent dans la religion sans faire les leurs. Pour les rendre plus faciles, il suffit de savoir que plus on fait des efforts aujourd’hui plus on se reposera demain quand c’est les autres qui seront confrontés à leur juge. Et plus l’individu est négligeant aujourd’hui plus les charges retenues contre lui pèseront sur ses épaules. En mettant ses comptes à jour dès à présent, il gagnera demain une place au Firdaws, mais toute négligence de sa part aujourd’hui le fera sombrer demain dans les remords au moment d’entrer en Enfer. » Toute personne qui est à la fois intelligente, déterminée et qui a foi en Allah et au Jour du Jugement Dernier passe sérieusement au crible tous ses actes, ses pas, et ses pensées. Le Jour de la Résurrection, il sera facile de voir lequel sera lésé entre l’homme scrupuleux et le négligent. [Le jour où chacun trouvera devant lui ses bonnes actions, mais aussi celles qu’il voudra tenir le plus éloignées possible].[20]

 

À suivre…

                     

Par : Karim Zentici

http://mizab.over-blog.com/

 

 

[1] Le repentir ; 111

[2] Mashâri’ el ashwâq ilâ masâri’ el ‘ushshâq (2/842).

[3] Risâla ibn el Qaïyim ilâ ahad ikhwânihi (p. 32).

[4] Rapporté par el Bukhârî (n° 36) et Muslim (n° 1876).

[5] L’araignée ; 69

[6] El fawâid (p. 109).

[7] Majmû’ el fatâwa (7/16).

[8] Le repentir ; 52

[9] Qâ’ida fî el inghimâs fî el ‘aduww (p. 36).

[10] Le discernement ; 52

[11] Voir : miftâh dâr e-sa’âda (1/70).

[12] Le fer ; 25

[13] Le discernement ; 31

[14] Majmû’ el fatâwâ (28/234).

[15] Majmû’ el fatâwa (10/356).

[16] Le pèlerinage ; 78

[17] E-Nâzi’ât ; 37-41

[18] La tromperie mutuelle ; 16

[19] L’évidence ; 18

[20] La famille de ‘Imrân ; 30

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