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10 février 2011 4 10 /02 /février /2011 00:48

 

 

Concernant certains ahwâl e-sûfiya, il y a eu à la première époque deux réactions à leur encontre : les uns les ont encensés à outrance en se rendant ainsi mukhti-ûn, mubtadi’ûn, dhallûn, et les autres les ont blâmé à outrance en se rendant ainsi mukhti-ûn, mubtadi’ûn, dhallûn. [Ibn Taïmiya dans majmû’ el fatâwa (11/5-15)].

 

Ibn Taïmiya dit également : « Le fait qu’une parole relève du kufr n’implique pas nécessairement de kaffar quiconque la prononce par ignorance, ou par une erreur d’interprétation.Établir la mécréance sur un cas particulier revient à établir qu’il est concerné par la menace divine, qui est pourtant soumise à des conditions et à des restrictions. »[1]

 

« C’est pourquoi, je disais aux jahmites panthéistes et négateurs qui reniaient qu’Allah (I) fût sur Son Trône à l’époque où leur fitna commença ; que si j’avais été l’auteur de vos paroles, j’aurais été un kâfir. Moi, en effet, je sais pertinemment que vos paroles relèvent de la mécréance, mais, à mes yeux, vous n’êtes pas des kuffarétant donné que vous êtes des ignorants. Je m’adressais ainsi à leurs juges, leurs savants, leurs Sheïkh et leurs émirs. À l’origine, leur ignorance provient des arguments de la pensée, de la part de leurs leaders, qui étaient ambigus, car leur bagage dans le domaine des textes authentiques, qui sont conformes à la raison saine, était léger. »[2]

 

« Quiconque croit que son Sheïkh pourvoit à ses besoins, qu’il le soutient, le guide, lui apporte son secours et son aide ; ou qui parfois lui voue l’adoration, des invocations et des prosternations ; ou qui le préfère au Prophète (r) soit dans l’absolu soit en lui reconnaissant certaines distinctions qui le rapprocheraient davantage du Seigneur ; ou que lui ou son Sheïkh sont exempts de suivre le Prophète (r; tous ces types d’individus sont des mécréants s’ils affichent ces croyances ou des hypocrites s’ils les tiennent secrètes.

 

Si ces types d’individus sont nombreux à notre époque, c’est parce que ceux qui prêchent le savoir et la foi se font rares et que les traces de la Révélation se sont estompées dans la plupart des pays. La plupart de ces gens-là n’ont pas un héritage suffisant de la Révélation pour leur permettre de connaitre le bon chemin. Beaucoup d’entre eux n’y ont pas accès. Lors des périodes d’affaiblissement ou d’intervalle entre les révélations (fatarât) et les endroits qui accusent ce phénomène, l’individu est récompensé pour la foi infime qu’il détient. Allah pardonne plus facilement à celui qui n’a pas reçu la hujja qu’à celui qui l’a reçue, comme en témoigne le fameux hadîth : « Il viendra une époque où personne ne connaitra ni prière ni jeûne ni pèlerinage ni ‘umra en dehors du vieil homme et de la vieille femme qui diront : « À l’époque de nos parents, les gens disaient : la ilâh illa Allah ! » On demanda à Hudhaïfa ibn e-Nu’mân (t) : « Que cela pourra-t-il leur servir ?

-           Cela va les sauver de l’Enfer, répondit-il. »[3]

 

En principe, toute parole qui relève de la mécréance, selon le Livre d’Allah, la sunna et le consensus des savants, est jugée ainsi dans l’absolu (qawl yutlaq), comme le prouvent les arguments textuels ; la foi fait partie des lois qui émanent d’Allah et de son Messager. Elle n’est pas laissée à l’initiative des hommes laissant libre court aux passions et aux suspicions. De plus, toute personne disant ces paroles n’est pas nécessairement un kâfirsans remplir les conditions ni écarter toute restriction possible pour le vérifier. »[4]

 

« Les philosophes et les ésotéristes (tiniya) sont des mécréants dont la mécréance est manifeste chez les musulmans… toutefois, celui qui ne les connait pas vraiment ne pénètre pas leur tendance. Il est même possible de s’imprégner de certaines de leurs idées, pour celui qui ne sait pas que c’est de la mécréance. Il est donc excusable en raison de son ignorance (ma’dhûr li jahlihî). »[5]

 

« Quiconque attribue à un autre qu’Allah ce qui n’appartient qu’à Lui est également un mécréant si la preuve céleste considérant comme mécréant tous ceux qui la délaissent, est établie contre lui. »[6]

 

« Les erreurs de ceux qui font un effort d’interprétation dans les deux domaines el khabariya (ou furû’ ndt.) et el ‘almiya (ou usûl ndt.) sont pardonnées. »[7]

 

« Il est interdit de taxer un musulman de mécréant pour un péché ou une erreur qu’il a commis… »[8]

 

« Si quelqu’un se voit établir la preuve contre lui pour avoir commis ce fameux shirk, et qu’ensuite il continue à le faire, il incombe de le mettre à mort et de lui réserver le même traitement que les païens ; il ne faut pas l’enterrer dans un cimetière musulman ni prier préalablement sur lui. Quant à l’ignorant qui n’a reçu aucun savoir (sur le sujet) et qui ne pénètre pas la substance du shirk pour lequel le Prophète (r) fit verser le sang des païens, on ne peut le taxer d’apostasie. »[9]

 

Ainsi, il est interdit de taxer un ignorant d’apostat sans auparavant avoir fourni contre lui les preuves prophétiques (el hujja e-risâliya) lui éclaircissant qu’il va à l’encontre de la loi divine. C’est valable pour n’importe quel auteur d’une parole qui, en elle-même, relève de la mécréance. En sachant que certaines hérésies (bid’a) sont plus graves que d’autres et que certains innovateurs ont une foi plus ancrée que d’autres. Personne n’est habilité à taxer de mécréant n’importe quel musulman qui a commis une erreur. Il ne convient pas de le faire avant de lui expliquer son erreur et d’établir toutes les preuves contre lui. Lorsque la foi est avérée chez un individu avec certitude, on ne peut la lui retirer sur une simple suspicion. La seule chose qui permet de le faire, c’est d’établir toutes les preuves contre lui et de dissiper de son esprit toute ambigüité (iqâmat el hujja wa izâlat e-shubha).[10]

 

Les Textes divins concernant le mauvais devenir de l’homme (wa’îd) et les paroles provenant des grandes références sur les questions du takfîr (taxer quelqu’un d’apostat), dutafsîq (taxer quelqu’un de pervers), et autres, n’impliquent pas qu’ils faillent les appliquer à une personne en particulier sauf si celle-ci répond aux conditions pour le faire et si toute restriction en est exclue.[11]

 

Sheïkh el Islam ibn Taïmiya souligne à ce sujet : « Après s’être imprégné des enseignements du Messager (r), il devient évident qu’il n’a jamais légiféré à sa communauté d’invoquer qui que ce soit parmi les morts : Prophètes, gens pieux, etc. ni à travers la formule d’el istighâtha (appel au secours) ou autre ni à travers la formule d’el isti’âna (appel au soutient) ou autre. Il n’a pas légiféré non plus à sa communauté de se prosterner devant un mort, un vivant, ou de faire toute autre chose de ce genre. Nous savons plutôt qu’il (r) a formellement interdit ce genre de choses comme il a jugé ces pratiques relevant de l’association interdite par Allah et Son Messager. Néanmoins, en raison de l’ignorance prépondérante, du nombre restreint de personnes initiées aux traces de la Prophétie parmi les dernières générations, nous ne pouvons pas condamner facilement les gens d’apostats pour ces raisons, avant de les avoir mis au courant des enseignements du Messager stipulant la non-pertinence de leurs pratiques. C’est pourquoi, je n’ai jamais démontré ce point à des personnes imprégnées du principe de l’Islam sans qu’elles se remettent en question en disant : c’est le principe même de la religion. Certains grands doyens expérimentés parmi nos amis disaient : c’est la plus grande chose que tu ais pu nous expliquer, car ils avaient pleine conscience que cela concernait le principe élémentaire de la religion. »[12]

 

À suivre…

 

Par : Karim ZENTICI

 



[1]Voir : minhâj e-sunna (4/458).

[2] E-rad ‘alâ el bakrî (2/494).

[3]Rapporté par ibn Mâja (4049) ; Sheïkh el Albânî l’a authentifié dans silsilat el ahâdîth e-sahîha (87).

[4] Majmû’ el fatâwa (1/113).

[5] Sharh el ‘aqida el asfahaniya (p. 211).

[6] Majmû’ el fatâwa (1/112) et e-rad ‘alâ el bakrî (p. 214).

[7] majmû’ el fatâwa (20/33).

[8] majmû’ el fatâwa (3/288). Ce passage mérite plus amples détails. Quoi qu’il en soit, Sheïkh el Islam précise ici que, dans la tendance hanbalite, il existe trois opinions concernant le statut de celui qui n’a pas reçu la révélation, et affirme que l’opinion la plus probable est celle disant qu’il est pardonnable !

[9] Majmû’ el fatâwa (1/113).

[10] Majmû’ el fatâwa (12/393).

[11] Idem. (10/372).

[12] El istighâtha (2/731). Il a expliqué ailleurs : « Si nous citons sans restriction les textes concernant le sort de l’homme dans l'au-delà (el Wa’d wa el Wa’îd) et si nous employons les termes d’apostat (Takfîr) et de pervers (Tafsîq), nous ne pouvons pas faire entrer une personne en particulier dans leur sens général avant d’établir à son encontre ce qu’ils impliquent de façon irréfutable. » [Voir : majmû’ el fatâwâ (28/500-501)].

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